Les tensions en mer de Chine du Sud
La Chine construit des îles artificielles pour revendiquer des zones maritimes
La Chine est en train d’agglomérer des milliers de tonnes de terre sur un récif corallien afin de le transformer en piste d’atterrissage. L’objectif : asseoir sa domination sur une zone stratégique très disputée, la mer de Chine.
Jusqu’à présent, la majeure partie de l’île de Fiery Cross, ou Yongshu, en Chinois, se trouvait sous l’eau, à l’exception de quelques rochers. Des images satellites, analysées par des experts anglo-saxons de l’IHS, ont montré que depuis quelques mois, des navires chinois rassemblent les sédiments sur la barrière de corail, afin de faire émerger des eaux une piste de 3 000 mètres de long sur 300 mètres, au plus, de large. Un port, à l’est de l’île, serait également en train d’être créé pour « accueillir des pétroliers ou de grands navires de guerre », selon les experts de l’IHS.
Yongshu est située dans l’archipel des Spratleys, un territoire en plein milieu de la mer de Chine dont les récifs confettis, d’une superficie totale de 5 km 2 , sont répartis sur une zone de 410 000 km 2 . Cette zone, inconnue du grand public, est d’un intérêt géostratégique majeur. Elle est le point de passage entre l’océan Indien et l’océan Pacifique et permet la communication de l’Europe et de l’Asie orientale. Près d’un tiers du trafic maritime commercial du monde y passe, 90 % de celui de la Chine. La Corée du Sud, le Japon et Taïwan y font transiter plus de la moitié de leurs ressources énergétiques. Si les éventuelles réserves de pétrole semblent pour le moment limitées, celles de gaz semblent au contraire très importantes : la zone pourrait comporter 13 % des réserves mondiales, selon le rapport du ministère de la Défense.
Outre l’évidente menace que représente la militarisation chinoise, la création de cette nouvelle terre vient asseoir la revendication de souveraineté chinoise : au regard du droit international, l’attribution d’une zone économique exclusive* est déterminée par la possession d’un territoire côtier.
D’après Le Figaro, 10 février 2015. http://www.lefigaro.fr/international/2015/02/10/01003-20150210ARTFIG00266-la-chine-construit-des-iles-artificielles-pour-revendiquer-des-zones-maritimes.php
La tentation de la territorialisation de la mer.
Le principe formulé par Grotius en 1604 dans son Mare liberum selon lequel la mer, res nullius, était un territoire international et que toutes les nations étaient libres de l’utiliser pour le commerce maritime, constitue encore le socle du droit maritime international actuel.
Cet équilibre a été remis en cause après la Seconde Guerre mondiale par certains pays en voie de développement tant pour des raisons d’ordre idéologique qu’économique, en raison notamment du progrès des techniques de pêche hauturière, du développement des exploitations pétrolières offshore puis des menaces croissantes sur l’environnement.
À titre d’exemple, chacun des pays riverains de la mer de Chine méridionale revendique l’ensemble de l’archipel des Spratly et les eaux afférentes. Bien qu’inhabitables, pas moins de cinq États y ont placé des garnisons ravitaillées à partir du continent. Cet intérêt partagé s’explique officiellement par la possibilité de gisements de pétrole, mais tout autant par la position de ces îles sur la route maritime très fréquentée entre océan Indien et Chine ou Japon, qui relie onze des douze ports les plus importants de la planète. En fait, les frontières maritimes sont devenues, bien plus que les frontières terrestres, sources de conflits potentiels.
Vice-amiral (2s) François Pézard, « Vous avez dit “onze millions de km” » ? », La Revue maritime, n° 492, Institut français de la Mer, décembre 2011.
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